Bookmark and Share Cultural Heritage of the World : Autopia in danger – Propositions/spéculations

Propositions/spéculations

Cultural Heritage of the World : Autopia in danger

Stéphane Degoutin, 2009. Subject: Perverse Urbanism

Une culture humaine est menacée: l’Autopia, développée aux Etats-Unis autour de l’usage de l’automobile. Reposant entièrement sur le faible coût des énergies fossiles, elle est incompatible avec les exigences du développement durable, et condamnée sans appel). Pourtant, la fin de l’Autopia constituerait une perte pour le patrimoine de l’humanité et la richesse des civilisations.


Image tirée d’une brochure éditée par Esso en 1958 pour promouvoir le programme fédéral de construction d’autoroutes Source (pdf)

L’automobile n’est pas uniquement un moyen de déplacement, elle est le fondement d’un ensemble culturel original et cohérent en totale symbiose avec l’histoire du pays, son échelle, son idéal de liberté individuelle poussé au plus haut point. Le mode de vie qu’elle implique a remis en question la manière dont nous voyons les villes et a engendré un système urbain complet, étendu à tout le pays puis au monde entier: freeways, échangeurs, malls, parcs d’attractions, campus de bureaux, banlieues résidentielles, maisons individuelles produites en série, sprawl… Remettre en cause l’Autopia brisera l’équilibre de l’ensemble du pays.

Obsolète en tant que système d’organisation des villes, ce mode de vie conserve sa valeur patrimoniale. Chercher à dépasser la ville automobile est une très bonne idée partout dans le monde, sauf aux USA. Pourquoi ne pas conserver l’Autopia uniquement ici, où cette culture est née, s’est développée, et a atteint son développement le plus complet? Il faut penser dès maintenant à sa muséification. La préserver telle quelle, dans les limites du pays, au plus proche de son âge d’or, comme on conserverait une ville médiévale. Pour s’assurer qu’aucune menace ne pèse sur elle, il est urgent de la classer sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.

Afin d’éviter les dérives de la muséification excessive, quelques tolérances seraient toutefois admises:
- Les automobiles pourront utiliser des sources d’énergie alternative;
- Des zones spéciales seront tolérées pour l’expérimentation d’autres modes de déplacement urbains.


L’Autopia de Disneyland, Anaheim, Californie.

Une fois que le reste du monde aura inventé d’autres modèles urbains, les USA pourront à nouveau, comme dans les années 1950, attirer des touristes pour leur faire découvrir les restes de la civilisation automobile, redevenue exotique. Le pays tout entier seraient converti en une immense exposition à ciel ouvert Les vieux drive in seraient remis en service, un musée de l’autoroute construit à Houston, des visites guidées organisées dans les premiers malls et les lotissements de banlieue fantômes, abandonnés après telle ou telle crise.

D’autant que mettre fin à l’Autopia est sans aucun doute une nouvelle utopie. Les moyens qui seraient nécessaires pour reconfigurer le pays sans l’usage de la voiture sont tout simplement inimaginables. La majorité des Américains habite dans des zones urbaines construites à une échelle qui n’autorise pas d’autre moyen de déplacement. Il faudrait donc abandonner la plupart des banlieues résidentielles et la majorité des zones de travail, pour reconstruire des villes plus denses où reloger (contre leur gré) des centaines de millions d’habitants. Que faire alors des millions de logements devenus inutiles? Les détruire par le feu? Il faudrait également reconstruire à partir de rien les infrastructures de transport en commun nécessaires aux déplacements de 300 millions de personnes. La dépense d’énergie nécessaire à cette reconstruction serait tout sauf écologique.


Stéphane Degoutin & Gwenola Wagon, Reburbia : Let Them Burn, 2009

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